•  Qu’est ce qui s’est passé ?
  •  Tout a commencé par un mot
  •  Lequel ?
  • Hello

Vous devez surement vous demandez comment ai-je fait pour me retrouver là, une jeune femme de 25 ans, sans histoire ; ayant grandi dans une famille chrétienne. Fille aînée d’un pasteur et d’une mère très pieuse, bien que celle-ci soit partie très tôt. Diplômée d’une grande école de commerce, comment je pouvais me retrouver là, assise dans cette pièce. Une salle lugubre et vide, très sombre, humide avec une table en bois où se trouvait une bougie en guise d’éclairage. Moi, pieds et poing liés, le tout attaché à une chaise par des cordes. Ces cordes qui tenaient mes poignets très fort, c’est l’un de ces jours où tu te dis que la mort ferait mieux de t’emporter tout de suite.

Tout a commencé ce soir du 4 août, le jour où le monde a cessé de tourner pour moi. Je n’ai jamais ressenti de douleur aussi forte de ma vie. Cette impression qu’on arrache votre cœur à coup de pioche. Il était là étendu à mes côtés, son corps était inerte et froid, encore plus froid que d’habitude. Je ne ressentais plus les battements de son cœur près de moi. Mon amour s’en était allé, il s’était faufilé dans ma chambre la nuit car il n’arrivait pas à fermer l’œil. Vous savez quand la fin est proche, votre âme le sent mais votre esprit n’arrive pas à admettre cette vérité. Cette nuit il m’avait dit, « Lechica, cette nuit c’est la dernière, j’ai très mal et j’espère que Lol te rendra très heureuse, sois heureuse s’il te plait ». À ces paroles, les larmes avaient jailli de mes yeux mais je lui demandai de dormir, car dans son sommeil il ne sentirait plus aucune douleur. Au réveil quand je le touchai j’avais tout de suite su qu’il n’était plus là. Le jour où j’avais appris qu’il avait ce cancer des os je pensais que mon monde s’était arrêté mais la vérité est que mon cœur a arrêté de battre ce 4 août à l’unisson avec celui de Kabi. Après avoir réalisé que mon frère était parti, je criai de toutes mes forces, entre mes larmes et ma profonde détresse, mon père rentra et s’occupa de sa dépouille, C’était nos adieux. Lol fit son entrée dans la pièce et me dit « Hello »

– Qui est Lol ?

Après la découverte de son cancer il y a 2 ans, Kabi décida qu’il devait avoir quelqu’un ou plutôt quelque chose qui veillerait sur moi quand il ne serait plus présent. Je pense que c’est le plus grand cerveau que cette planète ait connu, le cerveau du créateur. Il travaillait dans la cabane en bois derrière la maison tout au fond de la cour. C’était son projet secret et personne n’avait le droit de rentrer dans son « laboratoire » sans son autorisation. Entre la chimiothérapie et des heures de repos que je lui imposais, c’était là-bas qu’il passait le plus clair de son temps. Après des mois et des mois d’attente, j’eus enfin le droit de découvrir son projet. Ce jour-là, Il pleuvait depuis près de 3 heures, et Kabi m’invita dans la cabane pour pouvoir enfin découvrir son grand projet.

  •  Lechica ferme bien tes yeux et surtout ne triche pas
  •  D’accord mais l’attente devient insupportable.

Après quelques minutes d’attente, je pouvais enfin découvrir cette réalisation. Dans tout ce désordre, il y avait un petit seau qui contenait une matière organique blanche dont la composition ressemblait à celle du mercure. En face de moi il y avait ce jeune garçon souriant et fier de ce qu’il avait créé

  •  Qu’est-ce que c’est ? dis-moi, ce liquide sert à quoi ?
  • Ce que tu vois n’est pas un liquide en réalité mais un ensemble de micro robots équipés d’intelligence artificielle
  • Et il sert à quoi ? Et c’est quoi l’intelligence artificielle ?
  • C’est un programme qui fait de l’apprentissage par lui-même et de la prédiction. Ça veut direqu’il sait ce qu’il dira et apprend à savoir ce qu’il dira. Le test de turing est une proposition de test d’intelligence fondée sur la faculté d’une machine à imiter la conversation humaine et jusqu’alors aucune intelligence a réussi à passer le test. Enfin jusqu’à ce que Lol explose les records. Et ce qui est génial c’est que Lol peut prendre la forme humaine et toutes les formes qui lui plaisent
  • Whaouhh c’est impressionnant petit monstre. Mais pourquoi tu l’as appelé Lol
  • C’est pour toi Lechi, je veux que tu sois heureuse et Lol veillera sur toi, il te rendra le sourire quand tu en auras besoin et veillera à ce que jamais personne ne te le reprenne quand je ne serai plus là. Je ne supporte plus la douleur, les injections et virées nocturnes à l’hôpital, je sais que la fin est proche Lechi, je veux juste partir, et j’aurai le cœur léger si je sais qu’on veille sur toi. Bientôt j’aurai terminé et il pourra faire des interactions.

En ces mots je ne pus m’empêcher de pleurer et je le pris dans mes bras

– Cela n’explique toujours pas pourquoi tu es dans cette chaise. Tu sais bien pourquoi tu es là, tu le sais bien, alors parle avant que je ne perde patience

Après l’enterrement, la vie reprit peu à peu son cours. Il y avait des jours où je n’avais le courage de sortir de mon lit. J’avais quitté mon travail depuis deux ans et je me consacrais entièrement à la vie de Kabi, je veillais à ce qu’il aille bien et ne manque de rien, mais son absence m’avait conduit au fond du trou. Lol était présent, il prenait souvent l’apparence d’un petit garçon et s’occupait de la maison, de papa et moi. Mon père lui n’avait trouvé que l’alcool pour soigner ses peines. Mais que pouvais-je bien faire ? je cherchais encore une raison pour me pousser à me lever chaque matin. Lol ne pouvait remplacer celui que j’avais perdu mais il était présent. Plus les jours passaient, plus j’en arrivais à oublier que ce n’était qu’un robot. Il avait même appris des blagues et arrivait à me faire rire, l’obscurité faisait place à la lumière peu à peu dans ma vie. Un jour j’étais dans ma chambre et j’entendis la voix de mon frère au salon. J’étais bouleversée, depuis sa mort je ne l’avais entendu. Était-ce mon esprit qui me jouait des tours ? Je courus descendre pour voir ce qu’il en était, et il était là, devant moi. Ce corps froid que j’avais découvert à mon réveil, cette personne dont j’avais assisté à l’enterrement et que je ne cessais de pleurer depuis des mois. Mon petit monstre était bien là. Je m’approchai doucement et le touchai. Je posai ma main sur son cœur pour m’assurer que ce n’était pas un rêve. Mais il n’y avait rien. On aurait dit qu’il n’y avait pas de cage thoracique.

  • Alors je te plais comme ça ? Dit ce jeune garçon en souriant.

C’était Lol qui avait pris l’apparence de mon frère. Je le serrai contre moi et je me mis à pleurer toutes les larmes que mes yeux pouvaient contenir.

– Donc vous voulez vraiment me faire avaler que votre frère de 13 ans avait pu créer un robot qui se métamorphose à sa guise ?

Lol et moi avions passé un marché, quand on était que tous les 2 il pouvait être Kabi le créateur mais dehors devant les gens il aurait l’apparence de ce petit garçon qui était censé être mon cousin venu vivre chez nous. Au début, nous avions une relation quasi parfaite, jusqu’au jour où tout a basculé.

Il y avait cet homme, Christ, un ancien collègue de l’université. À la fin de nos études il était resté en Espagne, mais après 3 ans à l’étranger, il décida de rentrer au pays. Étant donné la relation que nous avions, je fus la première personne qu’il appela. Je me rappelle encore quand je l’avais revu. Un jeune homme à la peau ébène, ses yeux étaient d’une telle profondeur que le sens de la phrase « les yeux sont le reflet de l’âme » je le trouvais en lui. Il était très grand, et son corps ? je vous épargne les détails. Dans ce restaurant, c’était comme s’il n’y avait plus rien autour si ce n’est lui et moi. C’était une soirée mémorable, c’était la première fois ou j’étais vraiment comblée depuis la mort de Todjo. Il me raccompagna et nous avions échangé ce baiser que j’espérais depuis des années maintenant. Arrivée dans la maison, Lol m’attendait au salon. Son regard était froid et méprisant, je ne l’avais jamais vu dans cet état. Cette machine avait toujours été souriante et adorable avec moi. Mais là, j’avais la peur au ventre. Il se mit à hurler, il souleva la table et la lança contre le mur. La table était passée à 30 centimètres de moi, je courus vers les marches pour m’enfermer dans ma chambre mais en quelques secondes il était déjà devant moi pour me barrer le chemin. On pouvait lire la peur dans mes yeux, soudain il était très calme et me caressa la joue tout en douceur. « Ne vois plus jamais cet homme, n’oublie pas que tu es à moi ». Il s’en alla et j’avais pu rejoindre ma chambre. Je fermai ma chambre à double tour et mon cœur battait la chamade. J’avais tellement peur et cette phrase m’avait glacé le sang. Le lendemain je devais voir Christ, à notre endroit préféré, la balançoire près du lac. Je l’avais attendu toute la journée mais personne n’était venu. Le soir je reçus son appel et il m’annonça qu’il retournait en Espagne où sa fiancée l’attendait. Il était désolé pour les espoirs qu’il m’avait donnés. Tout ce qui me restait à nouveau c’était Lol. J’ai passé des nuits à broyer du noir, mais Lol était là, il avait recréé des hologrammes de mes souvenirs, c’est ce qui m’a fait tenir tous ces soirs. J’avais un bout de ma famille avec moi néanmoins. Je décidai de faire une petite promenade pour me détendre l’esprit, je n’avais pas à me morfondre pour un homme qui m’avait quittée au téléphone, Quoi de mieux que le lac. À quelques mètres, il y avait pleins de corbeaux autour de quelque chose. En m’approchant c’était le corps d’un jeune homme. Son thorax était ouvert et il n’y avait aucun organe, des oreilles aux yeux, en passant par ses poumons… C’était presque poétique, un sacré travail je peux vous l’assurer. Je partis de là en courant et appelai la police. En rentrant chez moi j’étais choquée par la scène.

  • –  C’était Christ ?
  • –  Oui c’était bien lui
  • –  Et votre père ? Que s’est-il passé le 10 avril ?Le soir de mon anniversaire, il rentra saoul comme à son habitude. Quand il était dans cet état c’était Lol qui s’occupait de lui. Mais le 10 avril j’étais seule, Lol était allé chercher des pièces en magasin pour me fabriquer un cadeau d’anniversaire. Ma vie était à la dérive et tout ce que je souhaitais c’était de rester toute seule enfermée dans ma chambre, seule avec mes démons. J’étais en haut quand j’entendis le bruit assourdissant d’un vase qui se brisait. Je me doutais bien que c’était mon père. En descendant je le voyais là assis par terre, il avait pissé sur lui. Quand il m’avait vu, il m’appela par le prénom de ma mère. Je m’approchai de lui pour l’aider à monter dans sa chambre. Il me sourît et me dit « mon amour kala, pardonne-moi de pas avoir pu prendre soin de nos enfants, pardonne-moi d’avoir perdu l’église que nous avions construite, pardonne-moi mon amour. Laisse-moi te rendre heureuse ce soir ». Je le laissais un moment devant les marches et je me dirigeais vers la cuisine pour mouiller un habit et l’essuyer le visage quand soudain mon père ou plutôt mon bourreau surgit derrière moi. Il me serrait si fort que je lui demandais en criant de me lâcher. Tout ce qu’il avait sur lui c’était son t- shirt qui sentait des kilomètres à la ronde. Dans notre lutte il m’avait cogné contre le frigo, ensuite c’était le paillasson. Je pouvais sentir sa barbe nauséabonde dans mon cou. J’essayais de me libérer en usant de toutes mes forces. Je fus blessée à la jambe et à la tête ce qui m’a valut une méchante cicatrice, mais la vraie blessure, celle de l’âme était en cours de se produire. Il réussit à me plaquer contre le sol en me chuchotant « ça m’excite quand tu te débats bébé ». J’étais à bout de force. Cette nuit c’était le jour où j’étais morte à mon tour. Je fixais la montre accrochée au mur et chaque seconde me paraissait être des heures. Sur ce plancher les larmes s’étaient envolé, il ne restait plus qu’une fille vide à l’intérieur.

– Ensuite ?

Mon sauveur arriva avant la fin de la partie et s’occupa de lui et il me déposa dans ma chambre. Je peux vous assurer qu’il fit un travail de maitre (sourire), il avait découpé chaque membre de son corps, centimètre par centimètre. Il avait pris soin de lui injecter une solution saline, cette solution le gardait éveillé mais ne soulageait pas la douleur. C’était plaisant de le voir mourir seconde par seconde. Son sang qui giclait à chaque seconde, d’abord lui découper par morceau en commençant par les oreilles et remonter vers le ventre. Ouvrir celui-ci et faire sortir des organes qui serviraient pour des dons dans les hôpitaux. Une belle façon d’honorer la mémoire de Kabi, c’est le genre de chose que tout le monde devrait vivre ou voir. Il n’y a pas sentiment plus fort et rien ne vous fait sentir aussi vivant

– Il y a une chose qui m’intrigue dans votre récit dit la dame qui se chargeait de poser des questions. Il y a une chose que j’ai du mal à comprendre, pourquoi vous parlez de votre frère deux fois comme le « créateur », et vous êtes admiratrice quand vous décrivez le cadavre de votre amant, souriante quand vous décrivez le mode opératoire du meurtre de votre père alors que vous étiez dans la chambre ? Vous êtes presque fascinée par ce que Lol a fait. La fameuse cicatrice sur votre cuisse le jour de votre viol a disparu. Et le meurtre de mon frère et ses amis ce soir du 10 avril où une petite fille affirmait vous avoir vue alors qu’on venait de vous violer ? Était-ce les œuvres de Lol ?

La dame s’approche de Lechica et la regarde dans les yeux. Elle avait ce sourire qui l’intriguait au plus haut point.

– Dis-moi un peu ce que j’ai raté dans ce récit ou ce que j’ai compris de travers.

La jeune dame posait sa main sur la poitrine de Nénamè, il n’y avait aucun battement cardiaque, on aurait dit qu’il n’y avait pas de cœur ni de cage thoracique. Comment était-ce possible ? la jeune fille avec qui elle discutait depuis un moment était peut-être ce Lol ? Au même moment des hommes ouvrirent la porte avec Lechika à leur bras.

lexique

  • Lechica : briller (Vili)
  • Kabi : largesse, charité (Vili)
  • Kala : vieux, adjectif qualifiant les choses (lingala)